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Aperçu

Cultiver ensemble nos liens avec la nature

Jake Tobin Garrett

Ami·es des parcs

22 septembre, 2022
National - Canada

Rapport 2022 sur les parcs urbains du Canada

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Quatrième rapport mettant en lumière les tendances, enjeux et pratiques qui façonnent les parcs urbains du Canada.

Pour plus d’informations, contactez :
jsammy@parkpeople.ca

Comment des chef·fes de file à travers le pays utilisent diverses méthodes pour encourager les gens à se rapprocher de la nature en allant à leur rencontre.

Cette étude de cas fait partie du Rapport 2022 sur les parcs urbains du Canada, mettant en lumière des projets, des personnes et des politiques inspirant·es à travers le Canada, qui offrent des solutions concrètes aux défis les plus urgents auxquels font face les parcs urbains.

Résumé

  1. Les groupes de marche peuvent être un moyen de se connecter à la nature, mais aussi de développer des liens sociaux et de créer des occasions d’apprentissage intergénérationnel et culturel.
  2. Sachant que tout le monde ne peut pas accéder à la nature de la même manière, il est important de créer des programmes et des ressources accessibles aux personnes de toutes capacités, notamment des ressources disponibles de chez soi et des promenades virtuelles.
  3. Il est aussi possible d’encourager la réciprocité en associant des programmes sur la nature à des ressources pédagogiques incitant les gens à rendre la pareille à la nature, que ce soit en participant à des activités d’intendance environnementale ou en prêtant attention à leur impact individuel.

Les personnes qui vivent dans des villes du Canada choisissent de passer plus de temps dans la nature. Lors de notre sondage réalisé auprès de plus de 3 000 personnes, 54 % d’entre elles ont déclaré se rendre le plus souvent dans des parcs naturels ou « sauvages », contre 34 % l’année dernière. Les Villes répondent également à cet intérêt accru, puisque près de 60 % d’entre elles déclarent avoir déjà mis en place des activités d’intendance environnementale ou envisagent de le faire en raison de la forte demande.

Il est clair que la nature exerce un fort pouvoir d’attraction lorsqu’il s’agit de retrouver un équilibre mental, physique ou psychique, un besoin fortement accru par les deux années difficiles de la pandémie.

Même si passer du temps dans la nature évoque souvent l’idée de marcher sur des sentiers sauvages, pour autant, il n’est pas nécessaire de se rendre dans un grand parc pour faire cette expérience. Comme nous l’avons mentionné dans notre autre article sur ce sujet, se sentir plus proche de la nature peut évoquer différentes choses pour différentes personnes. Pour certains d’entre nous, il peut s’agir de partager des anecdotes pendant une promenade dans un parc avec des amis; ou d’être plus attentifs à la nature chez nous ou près de chez nous. Cela peut aussi vouloir dire donner de son temps pour planter des arbres ou entretenir un jardin dans notre quartier.

Les exemples ci-dessous illustrent des programmes créés par des chef·fes de file des quatre coins du pays pour aider les gens à se rapprocher de la nature de manières différentes, mais tout aussi significatives.

Personnes faisant un picnic dans un jardin sur toit
Atelier sur les prairies pollinisatrices de la place Chartrand. Crédit : Hives for Humanity

Prendre du temps dans la nature pour l’apprentissage intergénérationnel

Lorsque Tammy Harkey a remarqué que des femmes de sa communauté souffraient de problèmes psychologiques au début de la pandémie, elle a décidé de faire quelque chose. Mère, grand-mère, conseillère et fière membre de la bande indienne de Musqueam, Tammy Harkey occupe actuellement le poste de présidente du Native Education College. Elle-même passionnée de marche, elle a créé les Musqueam Road Warriors, un groupe de marche pour femmes Autochtones dans le parc Pacific Spirit de Vancouver.

Le parc revêt une importance particulière pour la Nation Musqueam, car il fait partie de ses territoires traditionnels non cédés* et était autrefois proche de son village, explique-t-elle. C’est pourquoi, selon elle, les personnes Autochtones devraient se tourner vers ces endroits pour prendre soin d’elles-mêmes.

Se sentir connecté à la nature signifie ressentir un lien avec la terre, mais aussi avec les histoires liées au parc, aux plantes et aux remèdes qui s’y trouvent. « Nous avons désormais un groupe entier qui partage les histoires et les souvenirs de leurs familles », déclare Tammy Harkey. « Des histoires vraiment émouvantes. Des choses que je n’ai jamais entendues. »

« Les Aînées de notre groupe de marche sont devenues de véritables enseignantes », dit-elle, en soulignant l’importance de l’apprentissage intergénérationnel. Emportées par le tourbillon de la vie avant la pandémie, elles avaient peut-être oublié de prendre le temps d’écouter « ce qu’elles avaient à nous enseigner, ainsi que les messages et histoires qu’elles devaient nous transmettre », explique-t-elle. Mais le calme de la forêt et les cèdres tout autour d’elles les ont aidées à être plus présentes.

Aujourd’hui, le groupe existe toujours et compte une soixantaine de femmes et de jeunes filles de tous âges qui se retrouvent pour aller marcher dans le parc. Tammy Harkey souligne l’importance que ce groupe soit centré sur les femmes.

Lorsque les femmes parviennent à retrouver une stabilité – les mères de famille et les matriarches de leur communauté –, ceci se répercute sur la santé et la joie de vivre de toute une famille. Et c’est une tendance claire que nous avons vu émerger de notre groupe.

Personne debout avec un pouce levé près d'un arbre
Tammy Harkey

Œuvrer pour un accès universel à la nature

Pendant la pandémie, de nombreux citadins et citadines ont voulu passer du temps dans la nature pour réduire leur anxiété. Toutefois, se rendre dans des espaces verts n’est pas toujours facile ou possible pour les personnes en situation de handicap.

Selon Kari Krogh, cofondatrice de la EcoWisdom Forest Preserve*, « la pandémie a fait exploser les facteurs de stress pour les personnes présentant d’importants niveaux de handicap physique ». « Sortir, même prendre les transports en commun, lorsqu’on a une constitution fragile – et lorsque les gens vous toussent dessus – pour aller dans un parc », était un réel défi. Sans parler des potentiels problèmes d’accessibilité une fois sur place, ajoute-t-elle.

C’est pourquoi Paul Gauthier, directeur général du Individualized Funding Resource Centre* et elle ont créé un groupe offrant des programmes de bien-être axés sur la nature et accessibles en ligne.

Ces programmes sont ouverts aux personnes de toutes capacités qui peuvent participer depuis un lit, à côté d’une fenêtre ou dans un parc à proximité.

Les personnes en situation de handicap peuvent retirer de nombreux bienfaits de la nature et apporter leur contribution. Toutefois, elles ont besoin qu’on leur offre différentes manières d’accéder aux parcs publics

Kari Krogh, EcoWisdom Forest Preserve

Né de sa passion et de celle de Paul Gauthier, ce programme découle de leur expérience personnelle, explique Kari Krogh, ajoutant qu’elle a développé un handicap grave et a vécu trois ans entre quatre murs. « Je ressentais en permanence de fortes douleurs et j’étais tout simplement immobilisée », se souvient-elle. « J’aurais aimé avoir accès à un programme comme celui que nous proposons. »

Le programme a donc été conçu pour offrir un maximum de souplesse, en utilisant des vidéos sur la nature et des messages inspirés de la sylvothérapie et des neurosciences. L’équipe d’animation guide les participantes et participants dans des exercices de pleine conscience dans la nature, en les invitant à utiliser leurs sens, comme le toucher et l’odorat, ainsi que la visualisation.

« Pendant la pandémie, nous nous sommes sentis dépassés par tant de choses », dit Kari Krogh. « [Ce programme] permet aux personnes en situation de handicap de se retrouver entre elles pour se soutenir mutuellement », comme le reflètent les propos des personnes ayant participé au programme. L’un d’eux a fait remarquer que ses douleurs s’étaient atténuées et qu’il était « devenu plus détendu, joyeux et optimiste ». Un autre a déclaré qu’il « apprenait à utiliser la nature comme une ressource gratuite pour développer sa résilience ».

Bénéficiant initialement du financement de démarrage issu du programme de Bourses TD Ami·es des parcs, Paul Gauthier et Kari Krogh ont ensuite pu recevoir des fonds de l’Initiative canadienne pour des collectivités en santé du Gouvernement fédéral. Ceci leur a permis d’étendre leurs activités et de créer un programme accessible formant d’autres personnes à la mise en œuvre d’activités de bien-être axées sur la nature.

Au-delà de son rôle d’organisateur, Paul Gauthier a pu lui aussi retirer des avantages de son temps passé dans la nature. Il explique que, pendant la pandémie, son niveau de stress avait grandement augmenté en raison de son travail de soutien auprès des personnes en situation de handicap.

« Le fait de pouvoir faire une pause, de me recentrer sur moi-même et de prendre du recul sur mes problèmes du quotidien m’a vraiment permis de voir comment prendre soin de moi-même », dit-il. « Je suis aussi conscient qu’en faisant cela, je peux davantage aider les autres par la suite. »

Bol tibétain dans la neige et les feuilles d'arbres
Bol chantant de méditation tibétaine. Crédit : Kari Krogh, EcoWisdom Forest Preserve

Promouvoir l’intelligence naturelle

S’inspirant du concept d’intelligence émotionnelle, l’équipe d’Eva Riccius, gestionnaire des parcs à la Ville de Saanich, a inventé le terme « intelligence naturelle » lors de la conception d’un programme visant à promouvoir les liens avec la nature à Saanich. Peu importe que vous commenciez à passer du temps dans la nature ou que vous fassiez de la randonnée depuis longtemps, « tout le monde y a accès, quel que soit son niveau », dit-elle.

Ce programme a été conçu pour inciter les gens à se rapprocher de la nature par des moyens facilement accessibles : que ce soit d’identifier les oiseaux dans leur jardin ou de participer à des activités de restauration environnementale.

Conscient de la « fatigue des écrans » ressentie par beaucoup de gens, le personnel de la Ville de Saanich a présenté cette campagne comme un moyen de s’éloigner des écrans électroniques pour s’immerger dans la verdure. La municipalité s’est donc associée à la chaîne d’information et au journal de la ville pour transmettre des témoignages, a organisé des randonnées et des séances de bains de forêt, et a mis en avant diverses expériences dans les parcs grâce à une page dédiée sur son site internet*.

Cette initiative a entraîné une augmentation spectaculaire de la fréquentation des parcs, au-delà de la tendance déjà constatée pendant la pandémie. Utilisant des données générées par Google, l’équipe d’Eva Riccius a analysé le nombre de personnes fréquentant les parcs par rapport à un point de comparaison enregistré en 2019. Cette analyse a fait ressortir une augmentation de 100 % pendant la campagne, soit bien plus que la hausse induite par la pandémie et observée dans les municipalités voisines du Grand Vancouver.

En outre, le programme offre des suggestions sur la manière de pratiquer la réciprocité en incitant les gens à réfléchir à des moyens d’aider à leur tour la nature, en participant à des activités d’intendance, par exemple. Sur ce dernier point, Eva Riccius explique que l’intérêt a été tel qu’ils ont dû cesser d’accepter des bénévoles pour le moment.

Le programme a également suscité de nouvelles idées pour apporter des changements à long terme à certains parcs de la ville. Pour l’instant, beaucoup n’offrent que de l’herbe, des arbres et une aire de jeux, ajoute-t-elle. La Ville cherche aussi à adopter des mesures de naturalisation stratégiques dans certaines parties de ces parcs au moyen de plantations et de projets de restauration. Ces mesures pourraient contribuer à réduire l’arrosage et à créer divers habitats naturels – des initiatives déjà mises en œuvre dans des villes comme Vancouver, Kitchener, Mississauga et Edmonton. 

Graphique comparant l'évolution hebdomadaire en pourcentage des visites de parcs dans les villes de Métro Vancouver et du Grand Victoria en 2020
Résultats de la campagne « Less Screen Time More Green Time » menée par Natural Intelligence, Saanich Parks

Autres programmes intéressants 

  • Natural Heritage System survey* (Brampton, ON) : Dans un sondage sur Internet, Brampton a recueilli des renseignements sur la façon dont le public utilise la nature et s’en rapproche, afin de guider ses futures décisions.
  • Self-guided park walks* (Calgary, AB) : Calgary a créé une série de promenades autoguidées dans des parcs présentant des écosystèmes et une faune diversifiés afin d’encourager les gens à les explorer.
  • LEAD Youth Leadership Program* (Calgary, AB) : Ce programme, destiné aux jeunes de 11 à 15 ans, est axé sur le développement du leadership par le biais de l’éducation à l’environnement.
  • Wabanaki Tree Spirit Tours* (Fredericton, NB) : Dirigé par des guides Autochtones de la région, ce groupe propose des promenades transmettant des connaissances sur les plantes médicinales et comestibles, ainsi que sur l’histoire, les valeurs et les récits abénakis.
  • Horticultural therapy in the Enabling Garden* (Guelph, ON) : Accessible pour toutes les tranches d’âge et toutes les capacités, ce jardin à but non lucratif propose un programme d’horticulture thérapeutique avec des activités individuelles ou collectives.
  • Community Stewardship Program* (Richmond Hill, ON) : Ce programme offre aux résidentes et résidents de nombreuses possibilités de participer à des activités d’intendance environnementale, qu’il s’agisse de planter des arbres, de nettoyer des cours d’eau ou d’assister à des webinaires sur les grenouilles et les abeilles.
  • Fonds vert (Gatineau, QC) : Ce fonds municipal octroie des subventions à des organismes citoyens. Grâce à celles-ci, la Fondation Forêt Boucher a ainsi pu bénéficier récemment de matériel pédagogique, et Enviro Educ-Action a pu lancer un programme visant à répondre au problème d’écoanxiété chez les jeunes.
  • Jardin d’enfants* (Ottawa, ON) : Inspiré du High Park Children’s Garden* de Toronto, ce jardin géré par des bénévoles propose des activités centrées sur la nature et des programmes éducatifs pour les enfants.
  • InTO the Ravines* (Toronto, ON) : Basé sur un partenariat entre Ami·es des parcs et la Ville de Toronto, ce programme vise à aider les personnes des quartiers en quête d’équité à profiter des merveilles de la nature dans les ravins de la ville via notamment des bourses pour organiser des événements publics et un programme de formation des Ravine Champions. L’objectif est d’aider le public à se sentir connecté à ces endroits fragiles sur le plan écologique, de favoriser leur accès à ceux-ci et de les encourager à en prendre soin.
  • Parcs Cœur vital (Toronto, Montréal et Vancouver) : Ce programme, dirigé par Ami·es des parcs, est le seul programme au Canada dont l’objectif est de maximiser les effets et les avantages des grands parcs urbains du pays. Grâce à des partenariats avec des ONG dédiées aux parcs, à des activités de restauration écologique et à une approche d’évaluation commune, ce programme vise à favoriser la biodiversité en milieu urbain, ainsi qu’à mesurer et à amplifier les liens qui existent entre les expériences dans la nature et le bien-être des êtres humains.
Rendu possible grâce au généreux soutien de :