À la rencontre des amis de parc de Montréal : Les AmiEs du Courant Sainte-Marie

Étude de cas | juillet 6, 2021

Quand protéger l’insularité d’une ville devient la passion d’une communauté.

Le Parc du Pied-du-Courant et ses environs, en bref :

  • Arrondissement : Ville-Marie et Mercier-Hochelaga Maisonneuve
  • Emplacement : Secteur d’intérêt de la rue Davidson dans le quartier Hochelaga comme frontière à l’est jusqu’au Vieux-Port de Montréal à l’Ouest (depuis 2020).
  • Format : Espace public linéaire dans la partie ouest, au Vieux-Port, situé sur le bord du Courant Sainte-Marie.
  • Superficie : inconnu
  • Équipements : mobilier urbain (tables à pique-nique et bancs), commerces, arbustes et vivaces tout le long du fleuve au Vieux-Port. Dans la section est, il n’y a que le parc Bellerive qui compte quelques tables à pique-nique.
  • Faits historiques : Au départ, l’organisme, qui se nommait les Amis du parc Bellerive, se concentrait principalement sur ce parc pour, ensuite, élargir son territoire d’intervention et, ainsi, se renommer comme étant les Amies du Courant Sainte-Marie. Village au Pied du Courant à son emplacement actuel depuis 2014 suite à l'invitation des AmiEs du Courant Sainte-Marie. La Pépinière coproduit le site et en assure la programmation et la gestion saisonnière (4 mois par années).
  • Accessibilité : 10-14 minutes de marche au sud du métro Square-Victoria-OACI jusqu’à Champs-de-Mars pour la section ouest d’intervention et 15-22 minutes au sud du métro Beaudry à Préfontaine pour la section est. Piste cyclable sur Notre-Dame.

Mise en contexte

 

C’est après avoir emménagé par hasard dans le même immeuble du quartier Sainte-Marie que Victor Balsis et Gaëtan Auger se sont rencontrés en 2011. Gaëtan, aujourd’hui vice-président de l’organisme Les Amis du Courant St-Marie, est un amoureux du fleuve St-Laurent depuis sa plus tendre enfance.

« Pour moi, c’est une source qu’on ne valorise pas assez. Il y a toute une énergie, c’est comme la montagne, la nature. J’aimerais que les montréalais redécouvrent et se réapproprient le fleuve. » - Gaëtan Auger

Victor quant à lui, s’intéresse plus particulièrement à l’impact qu’a eu la construction du pont Jacques-Cartier sur le quartier, anciennement connu sous le nom du “Faubourg à m’lasse” et occupe aujourd’hui le rôle de président. :

« Moi j’étais plus intéressé par le pont Jacques-Cartier et la séparation entre les 2 quartiers. » - Victor Balsis

 

 

L’origine de l’organisme à but non-lucratif (OBNL) a suivi une consultation citoyenne menée dans le cadre du Programme particulier d’urbanisme (PPU) du quartier Sainte-Marie. Gaëtan y a déposé un mémoire pour exprimer que pour lui l’accès au fleuve était primordial et les vues sur le pont tout autant importantes. Par la suite, le Premier Forum Citoyen de l’éco-quartier Sainte-Marie s’est conclu sur la volonté forte de se pencher sur le dossier de la réappropriation du parc Bellerive.

Les deux voisins ont ainsi pris les choses en main et ont créé le groupe citoyen Les Amis du parc Bellerive en 2012, qui s’intéressait, au début, à la relation du parc du même nom et son accès au fleuve (à ne pas confondre avec le Parc de la Promenade-Bellerive qui se situe plus à l’est). Ils étaient, en quelque sorte, des fiers militants de cette idée de réappropriation du fleuve dans le Centre-Sud/Faubourgs, que ce soit dans le développement et le maintien, que dans la préservation des vues et de l'intégrité de cet environnement.

Le groupe a finalement changé de nom pour les AmiEs du Courant Sainte-Marie, en référence à l’histoire du quartier, qui tient son nom de sa situation géographique au pied du courant Sainte-Marie provoqué par le rétrécissement du fleuve à cette hauteur. Pour le groupe, le but premier est d’élargir la portion du territoire insulaire montréalais à revitaliser, qui s’étend donc de la rue Davidson jusqu’au Vieux-Port de Montréal. Le groupe souhaite également être un acteur central concernant les questions de redéveloppement et d’accessibilité fluviale à l’échelle métropolitaine (trame verte et bleue du Grand Montréal).

« On avait un peu cette vision large pour avoir accès au fleuve, avoir un parc linéaire sur le pont. C’est comme ça que ça a évolué . » - Victor Balsis

Pour ce petit groupe aux grandes ambitions, il importe que l’ensemble de la population montréalaise soit sensibilisé et puisse profiter de l’insularité de la métropole. Ils aimeraient, qu’un jour, le parc du Pied-du-Courant et ses environs deviennent un grand parc de Montréal fréquenté et apprécié par tous. Pour ce faire, il ne recule devant rien, partant à la conquête des terrains du Port de Montréal et le Canadien Pacifique (CP) sur les berges!

Vision et aspirations

 

En rencontrant et sensibilisant d’autres citoyens, Victor et Gaëtan tentent de diverses façons de démontrer le potentiel des sites “publics” sous-utilisés (ex.: chute à neige, des friches…). Bien sûr le parc du Pied-du-Courant est au centre de cette grande ouverture sur le fleuve que le groupe imagine, mais dans leur vision pour le secteur fluvial, ils veulent ajouter l’ensemble des terrains côté fleuve, entre la rue Davidson et le Vieux-Port, dont principalement des terrains du Ministère des transports du Québec (MTQ) et le Port. “Certes, c’est un défi colossal et un travail de longue-haleine, et les générations futures en bénéficieront. Nous sommes patients et nous persévérons”, affirme Victor Balsis.

 

 

Le conseil d’administration de l’organisme composé de trois membres se rencontre une fois par mois et, en parallèle, les membres travaillent à faire du lobbying auprès de différentes structures administratives et politiques, notamment par la rédaction et dépôt de mémoires, de rapports ainsi que la participation au conseil d’arrondissement et à des comités de consultation.

« On n’est pas des architectes, pas des urbanistes, mais nous vivons dans ces rues-là, on traverse ces rues tous les jours, on habite ici, on est un peu des experts du secteur. » - Victor Balsis.

Le groupe réfléchit aussi aux meilleures stratégies pour promouvoir leurs idées et trouver des solutions aux enjeux d’aménagement. Il préconise alors sur leur réseaux sociaux (page Facebook, chaîne youtube) la diffusion d’images et d’articles de cas inspirants, d’ici et d’ailleurs, et aspire de plus en plus au partage de croquis et vidéos produits par les membres pour illustrer les visions d’aménagements imaginées et possibles pour le secteur.

« Nous sommes en train d’informer et former des militants afin de leur permettre de rêver ces espaces. » - Victor Balsis.

L’organisme tient aussi des kiosques d’information durant les événements de quartier, comme par exemple au Village au Pied-du-Courant, pour informer les citoyens de leur mission et les sensibiliser à ce sujet.

Besoins et défis

 
Pour le secteur d’intérêt

« Notre rêve, c’est un jour marcher sur les quais » nous évoque Gaëtan Auger.

Les Amis du Courant Sainte-Marie s'entendent pour dire que l’enjeu crucial pour le parc du Pied-du-Courant et ses environs demeure la démocratisation de l’accès au fleuve. Notre implication est primordiale pour faire valoir les besoins des résidents, travailleurs et étudiants du secteur et améliorer notre accès au fleuve. Néanmoins, les deux cofondateurs affirment que malgré tous les défis, les gains sont incroyables depuis leur début, en 2012.

« Le parc, quand on est arrivé là, il était en décrépitude. Peu à peu, il y a eu la clôture, les guirlandes de lumières installées, la nouvelle toilette auto-nettoyante, les chemins qui ont été refaits, l’abreuvoir. Toutes ces revendications, c’est le groupe qui les a portées en allant souvent au Conseil. »

 

 

À court terme, ajoutons que le groupe se préoccupe aussi de toute la question reliée au déploiement du Réseau Express Métropolitain de l’Est. En effet, la construction de celui-ci peut compliquer davantage l’accessibilité et les vues au fleuve. L’organisme intervient, donc, auprès des élus municipaux et provinciaux afin de faire valoir leurs idées et, éventuellement, atteindre leurs objectifs. Dans le rapport de de leur dernière Assemblée générale annuelle, le groupe affirme que :

« Les villes qui ont misé sur les réaménagements de leurs fronts de mer et de leurs plans d’eau (soit le déplacement ou le réaménagement de leurs ports, des voies ferroviaires et de leurs autoroutes) ont connu un rayonnement international et un développement économique accru. Par ce fait, les citoyens ont gagné une meilleure qualité de vie en ayant accès à leurs plans d’eau. »

 
Pour le groupe

L’organisme est confronté à plusieurs défis, notamment, au niveau organisationnel, car celui-ci arrive à un moment crucial de son développement. En fait, Victor et Gaëtan ont beaucoup de dossiers importants auxquels ils doivent s’attaquer. Toutefois, comme les deux vieillissent, ils se soucient de qui pourra prendre leur relève.

« On a des dossiers, des visions et des projets à court, moyen et long termes, sur 5, 10, 15 ans, mais moi j’ai 75 ans. Je vais continuer à militer, j’ai une passion pour ça, mais ça nous prend aussi des nouvelles personnes. » - Gaëtan Auger

Effectivement, le groupe composé principalement de membres retraités âgés entre 60 et 65 ans ayant beaucoup de temps à consacrer aux nombreux projets, a de la difficulté à attirer des jeunes. Victor et Gaëtan aimeraient des nouvelles idées et des nouvelles compétences, particulièrement la maîtrise d’outils informatiques, afin d’apporter cette vague de renouveau à l’organisme qui compte les mêmes membres depuis les cinq dernières années.

« Nous autres on est les visages du groupe. Je me demande si les gens cherchent des gens qui leur ressemblent. Donc, on veut rejoindre des gens plus jeunes, parce qu’on cherche à amener plus de jeunes dans notre groupe. C’est eux la relève. On ne veut pas que si Gaëtan et moi on quitte, que personne prenne le relais. » - Victor Balsis

D’autant plus que les deux cofondateurs expliquent que les jeunes pourraient aussi les aider avec tout ce qui est relié aux médias. “On a une certaine présence médiatique, mais on trouve qu’on ne rejoint pas assez de monde. Comment rejoindre plus de monde, avoir plus de place sur la place publique? C’est ça qu’il nous manque un peu.” Ceci pourrait contribuer, entre autres, à faire connaître davantage leur mission et, même, inciter les gens à s’impliquer davantage auprès de l’organisme.

 

 

Pour essayer de remédier à la situation, ils ont changé leurs exigences pour devenir membre et ouvert leur bassin à tous plutôt que de se limiter aux résidents du quartier, mais le problème persiste toujours. Ils expliquent en partie cette difficulté, par le niveau de capacité de l’organisme à pouvoir mobiliser les gens de la communauté. Comme l’organisme est surtout actif à travers des actions de revendications politiques auprès des différents paliers de gouvernement, il est plus ardu de trouver des gens prêts à se lancer dans cette arène. Pourtant, un soutien supplémentaire pourrait faire toute la différence, selon Victor et Gaëtan:

« On pense à des projets, les gens quand ils les voient, ils aiment ça, ils disent “On veut ça!” Mais si 100 personnes du quartier ou les gens intéressés allaient au conseil de l’arrondissement et poussaient nos propositions, on avancerait plus vite. »

D’ici la fin de l’année, Victor et Gaëtan souhaitent que chaque membre de l’organisme pose une action concrète, qu’elle soit petite ou grande, dans le but de stimuler les changements dans le secteur.

« On aimerait que chacun regarde pourquoi ils aiment ce groupe, pourquoi ils veulent y être, et que chacun regarde au moins une chose qu’ils peuvent faire. Il faut que chacun s’implique. On veut plus des gens dans les balcons, c’est un groupe d’action et on ne veut pas attendre les propositions de la ville, on veut être à l’avant-garde. »

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