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Fermes urbaines collectives : des lieux de fierté et de rassemblement où exprimer ses « combats » et ses joies

octobre 4, 2021
Park People

Cette contribution d’Emilie Jabouin s’inscrit dans le cadre du projet « 10 ans ensemble dans les parcs urbains ». Cette série est réalisée avec le soutien de Dylan Reid et est illustrée grâce aux croquis de notre collègue Jake Tobin Garrett.

Ne manquez pas de suivre toutes les contributions publiées tout au long de l’année.

 


« Byen Pre Pa La Kay » en créole haïtien veut dire : le travail est continu et permanent. Ce dicton résume bien le travail de la terre, qui est une lutte constante faite d’adaptation et de transition permanentes. Il s’agit d’une expérience particulièrement pertinente pour les personnes Noires qui, au cours de l’histoire, ont dû se renouveler et se réinventer en permanence. Ainsi, pour la population Noire du Grand Toronto, les fermes collectives sont devenues des lieux de fierté, de rassemblement, d’amour et de bienveillance qui valent la peine d’être défendus.

 

Cultiver la terre pour réunir et soutenir les résidents

 

La Black Creek Community Farm* (BCCF), qui a été créée en 2012 sur un terrain de quelque 3 hectares loué auprès de l’Office de protection de la nature de la région de Toronto* (TRCA), constitue un véritable modèle en matière de sécurité alimentaire et d’agriculture urbaine durables. Gérée par les résidents, la BCCF permet à ses membres de cultiver des légumes, et d’avoir accès à sa forêt nourricière et à ses sentiers. Les fruits et légumes qui n’ont pas trouvé preneurs auprès des membres sont alors vendus au public. La ferme comprend une roue médicinale Autochtone, une école en plein air pour aider les enfants à développer leurs capacités motrices et animer les sorties scolaires, un foyer autour duquel on peut raconter des histoires et créer des liens, des carrés de jardin adaptés aux problèmes de mobilité des aînés et, surtout, des légumes correspondant à la diversité ethnique du quartier et des plantes indigènes. 

Selon ses membres, les services adaptés aux différentes cultures de la BCCF et son environnement en général constituent un modèle dont on devrait s’inspirer dans toute la ville. Comme le souligne Ama Deawuo, la précédente directrice générale de la BCCF, on trouve des fruits et légumes frais en abondance dans des quartiers aisés tels que Rosedale. Toutefois, dans les quartiers où vivent en majorité des personnes Noires, les gens n’ont pas accès à la même variété ni à la même qualité. 

 

Légende: Ama Deawuo, ancienne Directrice éxécutive de la Black Creek Community Farm

 

Avec un accès limité aux espaces verts pour répondre aux besoins agricoles et récréatifs de la population, le quartier dense de Jane & Finch où se trouve la BCCF illustre bien cette situation. Pour Sam Tecle, un membre du comité directeur de la BCCF qui a grandi dans le quartier, la ferme représente un endroit unique à Toronto, en Ontario, au Canada et dans le monde.

Elle « symbolise l’esprit de communauté, l’amour et l’interdépendance. Elle montre que nous pouvons être là les uns pour les autres, que nous pouvons nous soutenir et nous entraider. »

Sam Tecle décrit Jane & Finch comme un « quartier international » où vivent des personnes nouvellement arrivées au Canada, ainsi que des familles issues de l’immigration, notamment du Ghana, de la Jamaïque, de l’Équateur et dde l’Italie. Toutefois, il s’agit aussi d’un endroit qui a été confronté à la négligence et au manque d’investissement. Ce quartier animé compte des personnes généreuses et pleines de talent, qui se soutiennent mutuellement et font profiter le quartier de leurs compétences uniques. Toutefois, les informations que font circuler les médias sur le quartier sont souvent sensationnalistes, ne tiennent pas compte de ces qualités, et décrivent le quartier comme un endroit violent en proie à la criminalité. 

Pourtant, les résidents considèrent cet endroit comme chez eux, et certains jeunes dénoncent* ces préjugés.

Comme le dit Femi Lawson dans l’émission « Vice visits Jane & Finch » : [« On a tous quelqu’un qui nous influence d’une manière positive […]. Et lorsqu’on est entourés de personnes comme ça, cela agit sur nous. » 

Le quartier multiculturel et multiethnique de Jane & Finch a été le plus durement touché par la pandémie* à Toronto et a depuis longtemps été stigmatisé par la Ville et le gouvernement provincial. En tant que cultivatrice dans des jardins collectifs, agricultrice rastafari, amoureuse de la nature, défenseure et résidente de longue date du quartier, Peachtree Boucaud, qui a travaillé précédemment pour la BCCF comme responsable du marché, nous rappelle que, « nous sommes comme des abeilles au travail. Nous créons des liens et pollinisons ». La Ville de Toronto et d’autres organismes officiels, comme le TRCA, permettent aux personnes racialisées à faible revenu d’avoir accès à des espaces verts. Toutefois, lorsque l’on se penche sur l’histoire liée aux relations des résidents avec la terre dans la ville, on se rend compte que l’entretien de ces espaces verts d’une importance cruciale est plus complexe que l’on ne le pense. Tout a commencé avec celles et ceux qui ont cultivé cette terre et leur engagement à s’entraider.

 

Cultiver la terre est à la base de tout

 

Nous devons nous rappeler que les activités de gestion et d’entretien de la terre menées par des fermiers Noirs et racialisés et les Autochtones ont précédé les projets menés par la Ville. Ceci a engendré une agriculture urbaine à Toronto qui repose aujourd’hui sur des structures bien établies, comme la BCCF, des jardins collectifs et des projets gérés par les citoyens, comme des parcelles ouvertes où les gens pratiquent l’agriculture collective. Ces initiatives possèdent toutes une visibilité et des modèles de financement différents. 

Peachtree Boucaud est fière de dire que « beaucoup de ces jardins collectifs sont dirigés par un grand nombre de femmes Noires ».

En effet, les questions de sécurité alimentaire et de justice environnementale sont étroitement liées à la défense historique de leurs droits. « Nous vivons dans des endroits directement confrontés à cette injustice environnementale », explique Peachtree Boucaud. « Toutefois, notre voix n’est pas prise en compte à ce sujet. » Lorsqu’on lui demande de parler de son jardin préféré, elle se réjouit de mentionner celui situé à l’angle de Jane Street et Weston road : « Charlyn Ellis travaille au Emmett Avenue Garden, qui est l’un de mes préférés, […] il y a des abeilles, et on peut y apprendre tellement de choses. Malheureusement, le travail de ces gens au jardin Emmet passe souvent inaperçu. »

 

 

Les résidents ont beaucoup de connaissances. Peachtree Boucaud explique que souvent, les agriculteurs Noirs qui arrivent au Canada ont beaucoup de compétences, mais personne ne leur demande de faire part de cette expertise. Et les jeunes générations, comme moi, ont appris à jardiner et à cultiver grâce à leurs ancêtres. J’ai appris à jardiner grâce à ma mère et en écoutant les histoires de mes grands-mères qui cultivaient la terre en Haïti. 

Et l’histoire de Peachtree Boucaud est semblable, me dit-elle : « Mon grand-père était cultivateur, et mon père avait remplacé toute la pelouse par un jardin potager; la Ville de Toronto lui a d’ailleurs décerné un prix. Quant à moi, je ne me suis jamais considérée comme telle parce que c’était quelque chose de naturel. Ce n’est pas quelque chose que l’on part faire ailleurs, cela fait déjà partie de ce que l’on fait et qui fait partie de nous. Je me suis donc investie dans la ferme, j’ai commencé à travailler et j’ai géré le marché. Cela m’a ouvert les yeux. »

Le jardinage joue un rôle important dans la transmission des connaissances intergénérationnelles et dans l’autonomisation des groupes marginalisés en matière d’autosuffisance alimentaire.

Cependant, maintenir un espace aussi dynamique et axé sur l’humain demande des efforts constants. Sam Tecle explique que « pour que la ferme soit ce qu’elle est, il a fallu qu’Ama, le personnel et les résidents s’investissent beaucoup. Il a fallu aussi que les résidents se battent pendant longtemps auprès de la Ville; […] il a fallu établir une bonne relation avec elle pour que la ferme reste à plusieurs niveaux entre les mains des résidents. » Quant à Ama Deawuo, elle rêve de voir la ferme s’agrandir en ayant son propre bistrot entièrement approvisionné par les fruits et légumes de la ferme, cultivés et cuisinés par ses membres.

 

Des espaces verts collectifs comme lieux de vie pour les personnes Noires

 

« Cultiver la terre n’est pas qu’une activité agricole, c’est aussi un travail qui demande de l’amour », déclare Hannah Conover-Arthurs, responsable de programmes de l’Ubuntu Community Collective, une organisation promouvant la sécurité alimentaire et offrant des services liés à cette problématique. Par le biais d’une ferme urbaine au parc Downsview, au sud-est du quartier Jane & Finch, l’organisation offre aux mères célibataires Noires la possibilité de s’adonner au jardinage. En tant que cheffe cuisinière, son travail porte sur la guérison et la sécurité alimentaire, la culture des plantes médicinales, et vise à répondre aux problèmes de nutrition des mères de famille et de santé mentale; le tout avec une optique holistique du bien-être physique, de la spiritualité et de la relation avec la terre. 

 

Légende :  La roue médécinale Autochtone de la Black Creek Community Farm

 

Hannah Conover-Arthurs mentionne également l’importance pédagogique du jardinage qui permet d’acquérir des compétences et une meilleure confiance en soi et de voir la vie sous un autre angle. Elle emmène aussi ses neveux et nièces avec elle pour planter et récolter des légumes afin qu’ils « fassent partie du processus » et apprennent ainsi des choses qu’ils n’apprendraient nulle part ailleurs. »

Pour Fatin Chowdhury, responsable du développement et de la communication de la BCCF, sensibiliser les résidents sur la consommation d’aliments sains et sur la durabilité représente des accomplissements importants pour la ferme : « Notre programme Urban Harvest vise à sensibiliser sur le gaspillage alimentaire, la conservation des aliments, […] et les denrées alimentaires disponibles localement. Notre équipe chargée de l’éducation au jardinage organise de nombreux ateliers destinés aux enfants, aux jeunes et aux familles sur l’écologie locale, l’agriculture urbaine et le jardinage. Ce sont des sujets sur lesquels nous voulons vraiment sensibiliser les résidents pour qu’ils les appliquent chez eux. »

De nombreuses personnes qui habitent dans le quartier Jane & Finch vivent notamment dans des tours d’appartements et n’ont qu’un accès limité aux espaces verts où elles peuvent faire du jardinage, être actives et tisser des liens. « Je vis dans un appartement […] », dit Peachtree Boucaud. « J’essaie de faire pousser ce que je peux [sur mon balcon], et je passe le reste de mon temps au jardin collectif. » Dans les jardins de quartier, « les gens peuvent créer des liens et trouver un endroit où s’épanouir », ajoute-t-elle. « Ils leur fournissent aussi de la nourriture et leurs permettent de faire des économies pour éventuellement réaliser d’autres choses avec leur famille. » 

La pandémie et l’ordre de confinement ont commencé en mars 2020, c’est-à-dire en pleine saison de végétation, et ont initialement empêché les gens d’entretenir les jardins collectifs, compromettant leur bien-être physique et mental. De nombreux résidents « vivent dans de petits espaces de vie », souligne Peachtree Boucaud. Malgré tout, après avoir plaidé en faveur de la réouverture des jardins en toute sécurité, les résidents ont finalement obtenu l’autorisation. Ces endroits fournissent bien plus que des activités aux résidents, dit Peachtree Boucaud, « ils font partie intégrante de notre quartier ».

 

Défense des intérêts, solidarité, justice et éducation

 

Les fermes et jardins collectifs urbains gérés par les résidents sont aussi de vrais lieux de rassemblement. D’après Sam Tecle, en permettant de défendre les intérêts des résidents, ils offrent une véritable « éducation politique » qui s’inscrit dans une vision plus large de la justice pour les personnes Noires, Autochtones, racialisées et marginalisées.

 

Légende : l’école en extérieure de la Black Creek Community Farm

Selon Sam Tecle, les endroits comme la BCCF ont un intérêt multidimensionnel et « sont bien plus que de simples fermes ». Ils représentent « des lieux de rencontre, d’activités, d’apprentissage; ce sont des symboles et des lieux de fierté. »

Riche de son expérience personnelle et au sein du comité directeur, il explique que la ferme a souvent permis de prendre position contre des politiques racistes et discriminatoires : « Les membre de la ferme n’ont pas hésité à s’attaquer aux problèmes que rencontraient les résidents du quartier, que ce soit lorsqu’une épicerie locale a mis le lait maternisé sous clé ou lorsqu’elle a interdit l’accès aux poussettes ou aux appareils de soutien à la mobilité. Les membres de la ferme ont pris position très tôt, ce qui a poussé les gérants à résoudre rapidement le problème et à supprimer ce règlement. »

 

Une réponse plus rapide et la question de la propriété foncière

 

 

Les initiatives portant sur l’agriculture urbaine collective qui bénéficient du soutien de la Ville ne savent pas sur quel pied danser.

« La Ville doit se concentrer sur les questions de durabilité », explique Hannah Conover-Arthurs. « Nous devons constamment composer avec à des baux d’un an, puis les renouveler pour deux ans. Nous nous demandons toujours si nous pourrons poursuivre l’activité de la ferme l’année suivante. »

La question de la propriété et de la location des terres constitue un obstacle majeur pour les agriculteurs Noirs, car ils dépendent plus souvent des terrains publics que les personnes possédant des parcelles privées. Selon Peachtree Boucaud, ce qui est décourageant est que « la terre n’appartient pas aux résidents ». Ceci complique donc grandement la planification à long terme, les pratiques spirituelles culturelles en lien avec la terre et les pratiques agricoles en général. 

Si les personnes Noires décident d’investir leur temps et de travailler la terre, « ce n’est pas un investissement pour 3 ans seulement!

Cela représente notre moyen d’existence », déclare Hannah Conovers-Arthurs. Ces fermes ont une grande valeur pour celles et ceux dont l’identité y est rattachée et fournissent des services essentiels aux résidents en leur permettant de vivre une vie équilibrée et saine. « L’espace, le service et l’idée que nous offrons aux résidents ont une valeur bien plus grande que les financements que nous recevons. Pourtant, nous devons constamment implorer, quémander et demander des subventions », déplore Sam Tecle. « Nous n’avons même pas le luxe de pouvoir penser à ce que nous pourrions construire à cet endroit, sur le terrain de la ferme, dans 5 ans. » Il est donc impératif que la Ville change son modèle de gestion des terres en une approche à long terme. Comme le dit Peachtree Boucaud, offrir un accès à l’eau, des toilettes accessibles, des carrés de jardinage avec des sièges et d’autres initiatives favorisant l’agriculture urbaine et l’accessibilité représente des considérations importantes qui nécessitent une planification et un investissement à long terme pour répondre aux besoins du grand public. Et pourquoi ne pas imaginer que les personnes Noires puissent être pleinement responsables des terres dont elles s’occupent, sans supervision de la part de la Ville? 

Le problème de l’insécurité alimentaire* est bien antérieur à la pandémie. Selon une étude de l’Université de Toronto intitulée Feeding the City: Pandemic & Beyond* [Nourrir la Ville : au delà de la pandémie], « 4,4 millions de personnes, dont 1,2 million d’enfants de moins de 18 ans » n’avaient pas assez à manger au Canada. Le rapport confirme que les initiatives d’agriculture locales gérées par les résidents représentent la meilleure façon pour les groupes marginalisés et vulnérables d’avoir accès à des produits alimentaires frais et abordables. Il soulève aussi la question de savoir si la sécurité alimentaire et la durabilité pour tous, y compris pour les groupes marginalisés, constituent une priorité pour les gouvernements. D’après Peachtree Boucaud, la demande est indéniable, comme l’atteste la longue liste d’attente pour devenir membre des jardins collectifs.

 

Cultiver la terre pour créer un sentiment de fierté collective

 

Lorsque l’on parle avec les résidents, un certain sentiment de fierté personnelle et collective se dégage de leurs paroles. En réfléchissant à l’incidence que ces initiatives ont eue dans sa vie, Hannah Conovers-Arthurs parle « de l’inspiration, de l’amour et de la passion » qui suscitent une réaction en chaîne positive dans la vie des gens.

Quant à Sam Tecle, il parle du soutien considérable apporté par les résidents qui a engendré « un intérêt accru pour le jardinage, l’agriculture et l’éducation ». Pour Fatin Chowdhury, la BCCF a subi « un véritable changement d’identité » en offrant des services de livraison de nourriture aux résidents. Cette initiative a renforcé leur confiance dans la ferme qui représente désormais pour eux un véritable filet de sécurité social. Sans oublier bien sûr, « la joie que procure cet endroit », comme le dit Peachtree Boucaud. La BCCF a fait tomber les barrières et a décompartimenté les choses pour des personnes souvent marginalisées et enfermées dans une perception définie par leurs interactions avec les gouvernements. Elle a aussi rendu les plaisirs simples de la vie plus accessibles à des personnes et des jeunes alors confinés dans des quartiers densément peuplés. Enfin, elle leur a donné la chance de découvrir ce que Fatin Chowdhury considère être « un espace vert d’une importance cruciale dans la ville ».

Sam Tecle aime voir s’afficher cette fierté chez les membres de la BCCF lorsque, au cours du dîner annuel, « les membres sont fiers que des gens de l’extérieur se rendent à la ferme et vivent cette expérience agréable et chic et repartent peut-être en se disant que “Jane & Finch n’est pas exactement comme on le dit”. »

 

Source de joie et de bouleversements

 

Les programmes d’agriculture collective servent de véritables tremplins. « Ce sont des incubateurs », dit Hannah Conovers-Arthurs. Et Peachtree Boucaud d’ajouter : « On fait connaissance avec d’autres cultures, avec leur manière de cultiver et de polliniser les plantes. »

Quant à Hannah Conovers-Arthurs, elle explique comment les programmes destinés aux résidents leur offrent les outils nécessaires pour, un jour, obtenir leur propre terrain, lancer leur projet, puis leur propre entreprise. Elle considère comme quelque chose de sacré la capacité de prendre soin des membres de sa famille et de promouvoir le quartier comme faisant partie de la « cellule familiale ». Faire partie de l’Ubuntu Community Collective est un moyen pour elle de prendre soin de sa mère, d’aider les personnes qui se remettent d’un traumatisme et de créer un lieu où « les gens vous voient pour ce que vous êtes ».

Il s’agit d’un endroit « propice au bien-être, à la liberté, à la créativité, à la santé, à la transformation et à l’inspiration. »

 

Légende : L’entrée de la Black Creek Community Farm 

En ce qui concerne l’idée selon laquelle les gens qui nous entourent font ce que nous sommes, Hannah Conovers-Arthurs déclare : « lorsque l’on cultive la terre, on passe par toutes sortes de moments difficiles. Toutefois, lorsque l’on est bien entouré et que l’on voit ce que les autres font, on se sent soutenu. »

Elle estime que sa vie a été transformée en cultivant la terre, en commençant par son travail avec Fresh City Farms. Elle espère pouvoir un jour subvenir à ses besoins grâce à son activité agricole. 

Pour être honnête, cultiver la terre est difficile, mais les jardins collectifs « procurent aussi beaucoup de joie », dit Peachtree Boucaud. Les gens qui cultivent la terre représentent un véritable pilier pour l’agriculture à Toronto. Améliorer la sécurité alimentaire et le bien-être des gens, mettre sur pied des circuits alimentaires durables et créer un environnement sain sur le plan spirituel, mental et physique pour les résidents représente une lutte perpétuelle. Exiger que soient adoptées des stratégies durables pour le bien-être des gens fait partie du travail constant requis en matière d’autonomie, d’identité, d’héritage, de connaissance de soi, de caractère sacré de la vie, de lien avec la terre et de guérison suite à des traumatismes passés, actuels ou futurs; un travail qui permettra aussi de rompre avec des tendances néfastes à venir. 

Comme le répètent les résidents, cultiver la terre est un sujet multidimensionnel et intersectionnel. À cet égard, Hannah Conovers-Arthurs ajoute : « notre alimentation reflète notre façon de voir le monde ». La fierté, l’engagement social et les combats que suscite le fait de cultiver la terre en ont toujours valu la peine. Comme le dit un dicton souvent entonné fièrement en créole haïtien : « Nou pap kite peyi-a pou yo » (nous ne renoncerons pas à ce que nous sommes).

 

 

 

 

À propos d’Emilie Jabouin

Emilie Jabouin réalise un doctorat en communication et culture à l’Université Ryerson et à l’Université York. Sa thèse porte sur les organisatrices et journalistes Noires au Canada au début du 20e siècle. Grâce au conte et à la danse, Emilie aborde également l’histoire sociale et culturelle des diasporas africaines et leurs différentes formes d’expression. Retrouvez-la sur Twitter à @emilie_jabouin.

 


 

Cette contribution d’Emilie Jabouin s’inscrit dans le cadre du projet « 10 ans ensemble dans les parcs urbains ».

Cette série est réalisée avec le soutien de Dylan Reid et est illustrée grâce aux croquis de notre collègue Jake Tobin Garrett. Ne manquez pas de suivre toutes les contributions publiées tout au long de l’année.

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